La sophrologie et "la sclérose en plaques"

isabelle-banetIsabelle BANET est sophrologue - psychologue à Aix en Provence dans le sud de la France où elle utilise également l’hypnose Ericksonienne. Elue au conseil du Syndicat des Sophrologues Professionnel pendant 9 années, elle nous fait part de son savoir-faire qu’elle a acquis en cabinet libéral auprès de personnes atteintes de sclérose en plaques et plus largement de maladies chroniques lourdes et invalidantes.

 

Alain Giraud : La Sclérose En Plaques (ou SEP), est une affection du système nerveux central. Comment pourrait-on la définir ?

Isabelle Banet : Cette maladie touche le cerveau, le cervelet et la moelle épinière, qui ont en commun d’être constitués de cellules spécifiques, les neurones.

Ces derniers comportent un prolongement essentiel pour la transmission des informations depuis le cerveau, l’axone, par lequel cheminel’influx nerveux. Les axones sont protégés par une substance propre au système nerveux, la myéline. Elle a pour rôle d’accélérer le passage de l’information électrique au niveau de l’axone. C’est la myéline qui est attaquée chez les patients atteints de SEP. Elle est détruite, par plaques, ce qui donne son nom à cette affection.

Lorsque le trajet de l’influx est interrompu, l’information créée par le cerveau n’est plus transmise de façon adaptée au corps (et vice-versa).

AG : Ce mécanisme que vous décrivez explique l’apparition de symptômes.
La SEP est-elle considérée comme une maladie auto-immune neuro-dégénérative ?

IB : Tout à fait… Elle est la conséquence d’un dysfonctionnement du système immunitaire, en temps normal chargé de vous défendre contre les corps étrangers, qui, pour des raisons inconnues, se retourne contre vous. Classiquement, on distingue trois grandes formes de la maladie :

  • des formes rémittentes, qui se manifestent sous l'aspect de poussées.
  • des formes progressives où le handicap s'accroît régulièrement dès le départ sans poussée.
  • des formes secondairement progressives, où la maladie évolue de façon continue après une période de plusieurs années marquées par des poussées suivies de rémissions.
    Notons qu’il y a autant de SEP que de malades.

AG : Après cette description sommaire de la maladie, attachons nous plus particulièrement à ce qui caractérise les personnes atteintes de SEP. Nous pourrons ainsi affiner et ajuster l’accompagnement sophrologique de cette pathologie. Qu’en est-il exactement ?

IB : Il est fondamental de prendre conscience que « si la Vie est jeu de cartes, la maladie le mélange et change la donne ». La maladie est un chaos dans un parcours de vie, la personne qui souffre a besoin de réorganiser sa représentation du monde. Le bouleversement qu’elle engendre sera différent d’une personne à l’autre, en fonction de son histoire, son éducation, ses croyances.Néanmoins, dans les maladies dégénératives comme la SEP, il y a forcément (cela est vrai plus qu’ailleurs) une diminution des capacités physiques, qui engendre une dévalorisation, la personne se sent diminuée, le corps lui échappe ! Le corps est souffrance, ce n’est plus un ami.

 

AG : Il y a aussi l’incertitude du lendemain qui est là, bien présente ! Comment la maladie va-t-elle évoluer ?

IB : Sans oublier toutes les angoisses qui l’accompagnent. Que va–t-elle perdre à la prochaine offensive de la maladie ? Quelles seront les conséquences sociales, professionnelles, économiques ? La prise en considération du stress engendré par la maladie est fondamentale et nécessaire.

La maladie est ce que Frédéric Lenoir (écrivain et philosophe) appelle le « donné » de la vie. Nous n’avons pas choisi, nous n’avons pas voulu, mais c’est là. Et il faut apprendre à vivre avec ! Tout le challenge de sa gestion est là. Apprendre à vivre avec et non contre.

AG : Accepter est un parcours difficile pour une personne en souffrance ? Quels vont être les objectifs d’un accompagnement sophrologique ?

IB : Je préfère utiliser cette terminologie du « vivre avec » où chacun part de là où il est et fait avec ce qu’il est. Un accompagnement sophrologique régulier amènera le patient à :

  • Apprendre à vivre avec et non contre
  • Apprécier ce qui va bien dans le corps. La personne n’est pas qu’une maladie!
  • Renforcer la conscience des 5 sens, se sentir vivant, là aussi avec ce qui va bien (renforcer perception des sens qui ne sont pas affectés par la maladie.)
  • Apprendre à respirer en toutes circonstances, la respiration est l’outil numéro un qui permet de mettre à distance, de se recentrer !
  • Utiliser ses émotions pour soi et non contre soi
  • Limiter l’angoisse et l’anxiété liées à la maladie
  • - Aider le corps à intégrer les traitements parfois lourds et les douleurs qui peuvent les accompagner
  • Etre plus attentif à ses sensations et signaux d’alerte. Connaître les limites de son corps est un atout dans la prévention des poussées
  • Etre acteur de sa guérison : cela donne un sens à l’épreuve de la souffrance
  • Prendre le temps de s’écouter « Soi », d’écouter l’Autre
  • Vivre l’instant présent (pour éviter l’agitation mentale, les idées noires).
  • Responsabiliser chacun face à sa santé et non le culpabiliser

AG : La séance de sophrologie va donc ouvrir un espace de parole et d’écoute. Un moment privilégié pour initier un dialogue ! Va-t-elle permettre de mettre du sens, sans culpabiliser ?

IB : Je suis très attentive aux corrélations symboliques imposées de façon dogmatique. (Plaquer une explication toute faite sur un symptôme.) Au lieu d’imposer à la personne le sens de sa maladie, il est plus juste de l’aider à exprimer sa propre vérité. Les 3 grands principes de la sophrologie sont à l’œuvre dans la gestion de la maladie :

  • Principe d’action positive,
  • Principe du corps comme réalité vécue
  • Principe de réalité objective
    J’insisterai sur la conscience de l’instant présent. Vivre « ici et maintenant » est fondamental. Cela préserve bien des malades de l’angoisse. Quand tout va mal, être simplement là est une ressource, je dirais presque la seule !

AG : Dans cette vivance de l’instant, les apports de la phénoménologie ne sont-ils pas fondamentaux ?

IB : Certes… Ne voir que ce qui nous est donné à voir, ne pas verser dans nos croyances et nos a priori, forcément limitant.

Vous pouvez mesurer maintenant toute la puissance de l’accompagnement sophrologique (relaxations dynamiques et sophronisations). Le patient accompagné va :

  • Se réapproprier un schéma corporel défaillant
  • Développer la confiance en soi et en ses capacités
  • Restaurer une stabilité émotionnelle
  • Se projeter dans un avenir
  • Développer simplement la conscience d’être et donner du sens à ce qu’il vit

 

AG : L’utilisation des visualisations dont la psychoplastie est-elle efficace ?

IB : Je souhaitais justement apporter une mention spéciale à l’utilisation des visualisations. Visualiser les effets du traitement (psychoplastie), amène des résultats surprenants. J’ai l’exemple d’une personne qui souffrait d’une névrite optique suite à une poussée. Un potentiel visuel évoqué témoignait des lésions des gaines de myéline. Elle a pratiqué la psychoplastie tous les jours pendant plusieurs semaines. Elle voyait des « petits hommes musclés » en train de reconstruire la myéline perdue. (Il est préférable de laisser chaque personne utiliser son imagination en fonction de son propre système de référence).

Un peu plus d’un mois après, un nouveau potentiel évoqué démontrait des résultats spectaculaires sur la reconstitution de la myéline du nerf optique. Cette expérience n’a qu’une valeur de témoignage, elle n’a fait l’objet d’aucune étude scientifique. Notons néanmoins sa réussite. Nous pouvons également user et abuser des visualisations d’évocations agréables. Les émotions positives engendrées par la visualisation stimulent l’immunité, diminuent le niveau de stress et ses marqueurs physiques. Faîtes-vous plaisir, cela renforce votre immunité ! Apprendre à gérer une maladie, c’est apprendre à vivre

AG : Que peut-on dire en conclusion ?

IB : La maladie nécessite de réorganiser sa vie, redéfinir ses priorités, prendre davantage soin de soi. C’est un retour à l’essentiel. La maladie peut devenir un atout, une chance. Bien sûr, il est difficile de l’entendre au cœur de la souffrance.

Mais toutes les personnes que j’ai pu accompagner en ont témoigné, à un moment ou un autre. Elles s’aperçoivent qu’elles ont des ressources qu’elles ne soupçonnaient pas. Elles se découvrent différemment dans la maladie. L’intérêt de la sophrologie réside également dans cet autre regard porté sur le monde, cette ouverture vers d’autres possibles ! Les personnes malades développent une conscience aigüe du caractère éphémère de leur existence, leur permettant de vivre pleinement ce qu’elles ont à vivre, « ici et maintenant».

Isabelle Banet a été l’invitée de l’émission « parlons sophrologie » sur « radio médecine douce » animée par Patricia Penot. Voici le lien internet pour écouter l’enregistrement :

http://radiomedecinedouce.com/fr/broadcast/3641_Les_maladies_degeneratives

Vous pouvez échanger de vive voix au 06 07 52 12 68 avec votre sophrologue avant de prendre rdv